La Bite et le Couteau : Fondue vésulienne

La Bite et le Couteau - Fondue ChinoiseLa nuit du 28 juillet 1960 Jacques Brel visite la ville de Vesoul et fait la promesse d’en faire une chanson. Huit ans plus tard, chose promise chose due, il sort la désormais culte et connue internationalement chanson « Vesoul ». Où le chanteur belge y raconte de nombreuses destinations en plus de cette ville de la Haute-Saône devenue pour le coup connue dans le monde entier. Quarante-six ans plus tard, il est évident que le grand Jacques, s’il ne nous avait pas quitté, aurait été fier du nouveau paysage musical de la ville du Grand Est, et aurait aimé partagé un moment avec le duo que forment Jéjé et Floche. Groupe purement instrumental, la formation joue un punk décompléxé, qui n’a que faire des codes et qui tient surtout à s’exprimer dans une ambiance franchouillarde. Là où Jéjé se charge de faire crier les cordes et à remuer les nuques, Floche apporte toujours impeccablement la rythmique nécessaire à la batterie afin de toujours garder le public sous tension. Quoi de plus normal lorsque l’on s’appelle la Bite et le Couteau.

D’ailleurs le son de la guitare du premier titre « Buscail » est aigu et tranchant, et peut faire le même effet qu’une première écoute de la voix nasillarde des Beastie Boys. Des non-initiés peuvent croire que ça casse les oreilles, qu’on y comprend pas grand chose, et se demander si leurs micros ont eu un problème lors de l’enregistrement. Heureusement pour eux arrive Floche et sa batterie pour accélérer le rythme et pousser Jéjé à monter d’un ton. Signal pour que sa guitare monte dans les tours et amène le public comme sur des montagnes russes où le mal aux cervicales n’est pas loin. Avec juste un ralentissement au milieu de quelques secondes avant la grande descente et la dose d’adrénaline qui va avec pour reprendre de plus belle. A la fin, « Buscail » ne paraît plus si difficile d’accès et pousse le public déjà décoiffé à en redemander. Ca tombe bien, les nuques viennent à peine de s’en remettre que le deuxième titre pointe déjà le bout de son nez, ne laissant aucun répit.

« Staribeauf » enchaîne sur les chapeaux de roues avec un rythme effréné et sans moments pour respirer. Si « Buscail » a amené l’auditeur pour un tour de manège à toute allure, ce deuxième titre le propulse tel un boulet de canon vers d’autres cieux avec ce cris en tout début comme déclencheur. Envoyé dans les airs pour un vol de 1mn46, l’auditeur se prend plein les oreilles le jeu de batterie survitaminé de Floche, les notes de synthés rapides mais discrètes et les riffs puissants de Jéjé.

L’atterrissage n’est pas de tout repos et voilà qu’à peine remis de ses émotions, l’auditeur se prend un autre riff de Jéjé en pleine poire, supporté par le jeu de Floche qui crée l’effet d’une foule qui s’abattrai sur lui. A la fois pour un pogo géant mais aussi comme dans une révolte des masses, comme lorsque retentissent cet extrait de discours et où le rythme se fait plus lent. Floche tient un rythme soutenu créant une certaine tension, tandis que le jeu de guitare se veut plus planant avant d’être rejoint par ce premier riff puissant. Puis « Pilou », s’arrête net, la révolte tout en se rentrant dedans est-elle pour autant perdue ?

Difficile à dire à l’écoute du morceau suivant, qui exprimerait plus une marche funèbre ou une scène de zombies digne d’un film de Roméro. Le début de « Mac Doom » est sombre, fait froid dans le dos et glace le sang. Le son de la guitare de Jéjé n’a jamais été aussi gras et ne laisse aucun échappatoire au public avec ses notes répétées jusqu’à rendre fou. La batterie ajoute de la folie avec son rythme lent, ce qui donne l’impression d’avancer dans la nuit noire par jour de pluie et l’impression que son pire cauchemar va débouler d’un moment ou un autre. Si le ton s’accélère vers la fin, ce n’est que pour mieux renforcer ce sentiment.

CD sans prétention mais contenant quand même une connaissance du punk et des riffs et rythmes efficaces, Fondue Chinoise se vit comme une énorme fête en compagnie de ses amis ; ça rigole, ça danse, ça boit de trop, ça se lâche mais au final tout le monde quitte les lieux avec un sourire, signe que tous ont passé un bon moment. Les noms de morceaux comme « Staribeauf » et « Mac Doom » montrent bien que le duo ne se prend pas aussi au sérieux et se moque de leur image. A la fin de cet EP, l’auditeur ne sait peut être toujours pas s’il veut voir Hambourg, Paris ou même sa soeur, mais il sait qu’il veut encore de cette fondue chinoise confectionnée par la Bite et le Couteau.

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